La polyarthrite rhumatoïde ne touche pas que les articulations. Les yeux peuvent aussi être concernés, parfois dès les premières années de la maladie. Sécheresse, rougeur, douleur ou vision trouble peuvent révéler une atteinte inflammatoire. Mieux reconnaître ces signes permet d’agir vite et d’éviter des complications qui altèrent durablement le confort visuel.
💡 À retenir
- Environ 20% des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde présentent des symptômes oculaires.
- Les symptômes peuvent inclure la sécheresse oculaire, l’inflammation et des douleurs.
- Un diagnostic précoce peut réduire le risque de complications oculaires.
Comprendre la polyarthrite rhumatoïde
La polyarthrite rhumatoïde est une maladie auto-immune chronique qui s’attaque au revêtement des articulations et favorise une inflammation persistante. Au-delà des douleurs et des raideurs, elle peut provoquer des manifestations dites extra-articulaires, y compris au niveau des yeux. Cette atteinte oculaire résulte de mécanismes immunitaires communs à la maladie, mais aussi d’une fragilisation du film lacrymal.
Le système immunitaire produit des anticorps et des médiateurs inflammatoires qui ciblent notamment la membrane synoviale. Dans le même temps, les glandes lacrymales peuvent être moins efficaces, parfois en lien avec un syndrome de Gougerot-Sjögren associé. Des facteurs aggravants existent aussi, comme la sécheresse ambiante, la climatisation, le tabagisme ou certains médicaments asséchants. La surveillance ophtalmologique devient alors un allié du suivi rhumatologique.
Définition et causes
Sur le plan biologique, la polyarthrite rhumatoïde s’accompagne souvent de la présence du facteur rhumatoïde et d’autoanticorps anti-CCP. La susceptibilité génétique, des déclencheurs environnementaux et une réponse immunitaire déréglée alimentent l’inflammation. Le résultat est une cascade inflammatoire durable, à l’origine de douleurs, de lésions articulaires et d’atteintes oculaires variées.
- Génétique: certains haplotypes HLA-DRB1 augmentent le risque.
- Environnement: tabagisme, pollution et infections respiratoires récidivantes.
- Facteurs individuels: dérèglement immunitaire et microbiote déséquilibré.
Symptômes oculaires associés
Les yeux peuvent exprimer l’activité de la polyarthrite rhumatoïde. La plainte la plus fréquente reste la sécheresse, avec sensation de sable, picotements, gêne au vent ou à l’écran. Des épisodes d’inflammation peuvent survenir, avec rougeur, photophobie et douleur, parfois intense. L’atteinte est variable, mais touche une proportion notable de patients, autour de 20%.
Certains symptômes sont fluctuants et s’aggravent lors des poussées inflammatoires. D’autres s’installent de façon chronique si le film lacrymal reste insuffisant. La vigilance est de mise, car certaines inflammations profondes menacent la cornée ou la sclère et peuvent altérer la vision si rien n’est entrepris.
Types de symptômes oculaires
- Sécheresse oculaire et kératoconjonctivite sèche: brûlures, picotements, larmoiement paradoxal, vision fluctuante, gêne au réveil et en fin de journée.
- Épisclérite: rougeur localisée, inconfort modéré, sensibilité à la lumière, état souvent bénin mais révélateur d’inflammation.
- Sclérite: douleur profonde irradiant vers la tempe ou la mâchoire, rougeur violacée, sensibilité au toucher, urgence ophtalmologique.
- Kératite périphérique ulcérative: amincissement et ulcérations de la cornée, forte douleur, risque de perforation si non traitée rapidement.
- Autres signes: vision trouble, halos nocturnes, baisse visuelle brutale, paupières enflammées, fatigue visuelle accrue aux écrans.
Consultez sans tarder en cas de douleur vive, baisse d’acuité visuelle, photophobie importante, rougeur qui ne cède pas en 48 heures ou apparition de voile devant l’œil. Ce sont des signaux d’alerte qui justifient une évaluation urgente.
Importance du diagnostic précoce

Un diagnostic précoce des atteintes oculaires liées à la polyarthrite rhumatoïde limite les lésions durables et améliore le confort de vision. La détection rapide de la sécheresse, des épisclérites ou d’une sclérite avancée permet d’ajuster à la fois le traitement ophtalmologique local et la thérapie de fond rhumatologique. L’objectif est double: soulager vite et prévenir les complications.
L’examen ophtalmologique évalue le film lacrymal, l’état de la cornée et la pression intraoculaire. Des tests simples, comme le test de Schirmer ou la mesure du temps de rupture du film lacrymal, orientent le diagnostic. Des colorations à la fluorescéine visualisent les micro-atteintes de la surface oculaire. En cas d’inflammation profonde, un examen à la lampe à fente et des clichés spécifiques guident la prise en charge.
Rôle des professionnels de santé
Le rhumatologue et l’ophtalmologiste travaillent de concert. Le premier module les traitements systémiques afin de calmer l’inflammation de fond. Le second cible les symptômes oculaires et surveille l’évolution. Cette coordination évite les escalades de douleur, les cicatrices cornéennes et les baisses de vision évitables.
- Suivi de routine: un contrôle ophtalmologique annuel en phase stable, plus rapproché si symptômes persistants.
- Traitements spécifiques: surveillance rapprochée en cas de corticoïdes locaux ou de collyres immunomodulateurs.
- Médicaments particuliers: bilan de référence et suivi régulier sous hydroxychloroquine pour prévenir la rétinopathie.
Un exemple concret aide à s’y retrouver. Une personne avec sécheresse quotidienne et douleurs au réveil peut bénéficier d’un examen de surface oculaire, de larmes artificielles sans conservateurs et d’une optimisation du traitement de fond. Si des douleurs profondes apparaissent, la priorité est une consultation rapide pour exclure une sclérite et ajuster la thérapie systémique.
Options de traitement et prévention
Le traitement vise à soulager les yeux et à contrôler la maladie systémique. Une polyarthrite rhumatoïde mieux apaisée entraîne souvent moins de symptômes oculaires. Les collyres lubrifiants sans conservateurs, les gels le soir et les pommades la nuit réduisent l’irritation et protègent la cornée. En cas d’inflammation, des collyres anti-inflammatoires ou des corticoïdes locaux peuvent être proposés sur de courtes périodes, avec contrôle de la pression oculaire.
Lorsque la réponse est insuffisante, des collyres immunomodulateurs à base de cyclosporine aident à restaurer la qualité du film lacrymal. Les épisclérites peuvent répondre aux anti-inflammatoires. Les sclérites, plus graves, requièrent souvent des corticoïdes systémiques et des traitements de fond antirhumatismaux (DMARDs) comme le méthotrexate, voire des biothérapies. Une kératite périphérique ulcérative est une urgence thérapeutique qui impose une coordination étroite entre ophtalmologie et rhumatologie.
Conseils pour la gestion des symptômes
- Hydratez et protégez vos yeux: larmes artificielles sans conservateurs dans la journée, gel le soir, lunettes enveloppantes à l’extérieur.
- Adoptez la règle 20-20-20 aux écrans: toutes les 20 minutes, regardez à 6 mètres pendant 20 secondes, et clignez volontairement.
- Améliorez l’environnement: humidificateur d’air, pauses régulières, éviter la climatisation dirigée vers le visage et la fumée.
- Soignez les paupières: compresses tièdes 5 minutes puis hygiène palpébrale quotidienne en cas de blépharite associée.
- Adaptez les habitudes: limiter les lentilles de contact en période d’inflammation, porter des lunettes de soleil, discuter des médicaments qui assèchent avec votre médecin.
Pratiquez une auto-surveillance simple. Notez les jours de gêne, les circonstances déclenchantes et la réponse aux collyres. Ce journal aide à ajuster le traitement avec votre ophtalmologiste et votre rhumatologue. Consultez en urgence si vous ressentez une douleur importante, une baisse de vision ou une rougeur inhabituelle qui persiste malgré les soins, car une prise en charge rapide réduit le risque de séquelles visuelles liées à la polyarthrite rhumatoïde.